Pour tous les cuisiniers, le tablier est l’une des pièces phare de notre garde-robe : un gâteau à préparer, une sauce tomate à faire mijoter nécessitent toujours un tablier, et quel plaisir pour les enfants que de revêtir le même que Papa ou Maman pour mettre les mains dans la farine, ou bien jouer à l’infirmière ou au boucher…
Les origines du tablier
Au départ, pourtant, le tablier n’a rien d’un vêtement : au Moyen Âge, c’est le nom de la grande pièce de tissu que l’on pose sur la table (d’où son nom) pour la protéger des taches et des coups. Une nappe, donc ! Mais très vite, dès le XVe siècle, le mot désigne le tissu que revête les travailleurs pour se protéger.
Il est dès lors un vêtement professionnel : il protège les bouchers des éclaboussures de la viande, les cuisinières des projections de sauce, mais aussi les forgerons, qui revêtent un grand tablier de cuir pour éviter les brûlures. Longtemps, les tissus sont restés chers, et la lessive plus que compliquée, il importait donc de préserver le plus possible les vêtements que l’on portait, même et surtout pour travailler. Évidemment, chaque profession avait alors son tablier, dont la forme et la matière dépendaient directement de l’usage que l’on en faisait : le cuir était souvent réservé aux hommes exerçant des professions difficiles comme les maréchaux-ferrants, bourreliers ou teinturiers, par exemple.
Au XIXe siècle, les métiers en lien avec la cuisine ou le service arborent des tabliers blancs, en étoffe plus ou moins fine. Les cuisinières et les bouchers sont drapés dans de grands tabliers, avec ou sans bavette, en toile blanche ou écrue, plus facile à lessiver ou à faire bouillir, tandis que les domestiques des maisons bourgeoises doivent porter un tablier beaucoup plus petit, souvent sans bavette, en étoffe fine parfois ornée d’un rebord de batiste, plus décoratif que vraiment utile puisque la présentation exigeait qu’il reste propre. Aujourd’hui l’usage du tablier peut sembler nettement moins codifié.
Il a disparu de certains métiers au profit d’autres vêtements professionnels, comme la veste blanche en cuisine, alors que d’autres professions, comme la boucherie, restent fidèles à leur tenue traditionnelle, chemise à petits motifs et grand tablier à bavette asymétrique, un uniforme que certaines maisons agrémentent, étonnamment, d’une cravate ou d’un nœud papillon !
Les différents modèles de tablier
Si certains métiers restent très attachés à leur tablier, c’est surtout parce que, comme tout vêtement professionnel, celui-ci est conçu tout spécialement pour répondre aux nécessités quotidiennes de chaque professionnel. Ainsi, le petit tablier de serveur, qui semble bien modeste, comporte les quatre ou cinq poches indispensables pour ranger la monnaie, le calepin et le décapsuleur, sans jamais le gêner dans ses mouvements pendant les services.
Plus long, le tablier de brasserie doit apporter les mêmes avantages, notamment les nombreuses poches, et protéger efficacement les vêtements de dessous, toujours sans entraver les mouvements : c’est pourquoi il est souvent pourvu de fentes, et réglable par une longue ceinture nouée devant, qui assure qu’il ne bougera plus une fois ajusté.
Le plus connu, celui qu’adoptent en général aussi les cuisiniers amateurs, est le tablier à bavette. Il a l’avantage d’être très couvrant : long comme le tablier de brasserie, il protège aussi le haut du corps et s’ajuste en général derrière le cou, pour s’adapter parfaitement à la morphologie de celui ou celle qui le porte. De ce fait, c’est un vêtement professionnel parfait en cuisine comme en salle, et qui convient très bien au personnel des bistrots qui peuvent être polyvalents. En outre, il est souvent adopté par les sommeliers et les cavistes, qu’il protège aussi parfaitement des conséquences de petites maladresses.
Très proche du tablier à bavette, mais d’un usage beaucoup plus restreint, le tablier à bavette asymétrique est quasiment réservé aux bouchers et charcutiers : attaché sur une seule épaule, il laisse en effet la possibilité pour les grands gestes amples que nécessite la découpe de la viande. Souvent blanc, il peut aussi être porté noir ou rouge, pour une allure plus chic, et presque toujours accompagné de la chemise de boucher à petits motifs bleu foncé, véritable uniforme de la profession.
Les tabliers en PVC sont des tabliers à bavette, qui descendent généralement bien en-dessous des genoux. Souvent lourds, ils sont le vêtement professionnel incontournable des professions très salissantes ou exposées à l’eau ou aux intempéries : les plongeurs, mais aussi les écaillers, les poissonniers, parfois les maraîchers, ne peuvent faire l’économie de ce vêtement qui leur évite de se retrouver trempés au bout d’une demi-heure d’activité. Des modèles plus légers ont été conçus pour les femmes, et sont également utilisés par les professionnels du soin et de l’esthétique qui sont en contact avec l’eau, comme les masseurs ou les personnels des centres de thalassothérapie.
Enfin, on voit souvent les vendeuses de boulangerie ou de charcuterie sanglées dans des tabliers chasubles, légers et colorés, qui évitent les menues salissures sur tout le haut du corps, le plus exposé, sans entraver les mouvements. En outre, leur gamme de coloris et de motifs permet à l’entreprise de personnaliser facilement ce vêtement professionnel.
Ainsi, chaque type de tablier s’est longuement adapté à une profession particulière pour en devenir finalement le vêtement professionnel incontournable, et il est aujourd’hui difficile d’imaginer un professionnel se passer du tablier conçu spécifiquement pour répondre aux exigences de son métier. Pratiques, ils permettent aussi à la clientèle de savoir immédiatement qu’elle a affaire à un véritable professionnel, en toute confiance.
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